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COURS Non classé SEMESTRE 2 Unité d’enseignement 1.3 : Législation-éthique-déontologie

LA RESPONSABILITE JURIDIQUE EN ETABLISSEMENT DE SANTE

Définition et notions

En droit, être responsable signifie assumer les conséquences de ses actes. Le soignant lors de son activité professionnel effectue des actes, prend des décisions et administre des produits actifs. Or, il peut arriver qu’à la suite d’un acte ou d’une décision, des conséquences dommageables se produisent pour un patient, dans ce cas il est demandé au professionnel de s’expliquer et il devra assumer les éventuelles erreurs commises, c’est ce qu’on appelle la responsabilité.

L’article 1382 et 1384 du Code Civil stipule « tout fait quelconque de l’Homme qui cause à autrui un dommage oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer ».

L’article 1384 stipule « on est responsable du dommage que l’on cause non seulement par son propre fait mais encore de celui qui est causé par le fait des personnes dont on doit répondre ou des choses que l’on a sous sa garde ».

Les différentes responsabilités juridiques encourues et leurs modalités d’engagement

La responsabilité civile ou administrative

La responsabilité civile et administrative sont regroupées parce qu’elles fonctionnent de la même manière et obéissent aux mêmes objectifs. Par contre on parle de responsabilité civile pour les soignants qui exercent dans le secteur privé alors que la responsabilité administrative concerne les soignants qui exercent dans le secteur public.

L’objectif commun est la réparation du préjudice subi par le patient, on parle donc de responsabilité réparatrice. Le patient en engageant ce type de procédure souhaite obtenir une compensation financière par rapport à un dommage qu’il estime avoir subi. Cette compensation se fera sous la forme de « dommage et intérêt ».

 

Les conditions d’engagement de la responsabilité civile ou administrative

Pour que la responsabilité civile ou administrative soit engagée au niveau des professionnels et soignants, 3 conditions sont nécessaires :

  • Existence d’une faute commise par le soignant. La faute peut se définir comme un comportement anormal. Elle peut être volontaire ou involontaire sachant que l’on peut reprocher que des fautes involontaires.
  • Existence d’un préjudice subi par le patient. Pour que la responsabilité soit engagée il faut que la faute commise par le soignant soit bien à l’origine du préjudice subi par le patient. Il peut être physique, moral ou autre.
  • Existence d’un lien de causalité, un lien de cause à effet entre la faute commise par le soignant et le préjudice subi par le patient.

Si les 3 conditions sont réunies, la responsabilité civile ou administrative sera engagée.

 

Evolution de la jurisprudence en matière de responsabilité médicale ?

Le raisonnement suivit par les juges n’a pas toujours été le même en matière de responsabilité lié à un acte de soin. On est passé d’une irresponsabilité générale des professionnels de santé notamment des médecins « aléa de la pratique professionnelle » qui justifiée l’exclusion de la faute  (il n’y avait jamais de faute, juste un aléa) à une responsabilité pour faute lourde « faute grave et inexcusable » en 1835. Puis à une responsabilité pour faute simple et là il n’y a pas de critère de gravité et cela constitue le régime actuel.

Le véritable tournant : l’arrêt Mercier qui a été rendu par la Cour de Cassation le 20 mai 1936. Cet arrêt pose un principe fondamental à l’exercice de la profession de soignant : celui de l’obligation de moyens :

Le professionnel de santé doit tout mettre en œuvre, doit mobiliser tous les moyens nécessaires aux données des regards acquises par la science pour tenter de guérir ou soulager la douleur du patient.

En opposition à l’obligation de moyens, on trouve ce qu’on appelle l’obligation de résultat qui signifie d’avoir atteint les objectifs déterminés. En matière de soin c’est d’obtenir la guérison quelque soit les circonstances ce qui a non-sens c’est un objectif inaténiable. La responsabilité civile du professionnel de santé ne peut s’entendre que dans le cadre d’une obligation de moyens. En effet on ne va pas reprocher à un professionnel de santé de ne pas avoir obtenu la guérison du patient. Par contre on peut lui reprocher de ne pas avoir tout mis en œuvre pour que cela se produise.

 

Les tribunaux concernés

Pour la responsabilité civile, ce sont les tribunaux d’Instance ou de Grande Instance qui sont concernés. La répartition des litiges entre ces deux juridictions se fait selon le montant de dommages et intérêts demandés. Pour les litiges de moins de 10 000euros c’est le Tribunal d’Instance et pour le montant de plus de 10 000euros c’est le TGI.

Pour la responsabilité administrative,  c’est le tribunal administratif.

 

Les paiements des dommages intérêts

Si la responsabilité administrative ou civile du soignant est engagée les dommages et intérêts devront être versés à la victime du dommage dans le cadre de la réparation.

Pour le secteur public comme pour le privé celui qui assume les conséquences juridiques des actes de ces préposés est l’assurance de l’employeur car depuis la loi du 4 mars de 2002 (Loi Puchner) relative aux droits des maladies et à la qualité du système de santé une obligation d’assurance a été instituée pour tous les établissements public et privé. Cette assurance couvre tous les actes des salariés « agissant dans la limite de la fonction qui leur a été impartit ». Il y a des exceptions : la malveillance et l’acte volontaire. Selon la loi L.11.42-2 en cas de demande de dommages et intérêts pour un préjudice consécutif à une faute commise dans la réalisation d’un soin, c’est l’assureur de l’employeur qui indemnisera le patient. L’assureur ne peut pas se retourner contre le salarié pour payer, sauf si l’acte est volontaire ou s’il y a eu malveillance prouvée ou avérée. Dans ce cas de figure, le personnel peut être blâmé, mise à pied ou licencié.

 

La responsabilité pénale

L’objectif de cette responsabilité n’est plus la réparation d’un préjudice subit mais la punition. La sanction de celui qui a commis le dommage. On parle de responsabilité punitive. Le patient ne demandera pas de réparation financière mais la sanction.

Les conditions d’engagement de la responsabilité pénale

Pour que cette responsabilité soit engagée, il faut que le soignant est commis une infraction. C’est l’équivalent de la faute à la différence que l’infraction st un comportement d’écrit et punit par le Code Pénal. Traite : meurtre, homicide involontaire, violation du secret professionnel, non-assistance à personne en danger. Pour qu’un acte soit qualifié d’infraction, 3 éléments sont nécessaires :

  • Un élément légal : il faut un texte de loi qui interdise l’accomplissement d’un acte et le punisse. C’est ainsi que l’homicide involontaire est passible d’une sanction conformément à l’article 221-6 du Code Pénal. Le code pénal recueil toutes les lois qui prévoient les différentes sanctions.
  • Un élément matériel : il faut des éléments matériels, des faits qui permettent de dire qu’un acte interdit a été accompli par un soignant ou que celui-ci y a participé.
  • Un élément moral : il faut qu’on puisse imputer l’acte à son auteur. Pour les actes volontaires tels que le meurtre, l’élément moral est l’intention de  nuire.

Pour certains actes involontaires, il n’y a pas intention de nuire, donc le législateur a prévu 5 critères qui permettent de définir l’élément moral :

  • Imprudence
  • Négligence
  • Maladresse
  • Inattention
  • Le manquement à une obligation de sécurité de prudence imposée par la loi ou les règlements

Les tribunaux concernés

Cela dépend de la catégorie des faits. Les infractions pénales sont réparties dans 3 catégories liées à des degrés de gravité. Chaque catégorie d’infraction est examinée par une juridiction différente.

  • Les contraventions : Tribunal de Police
  • Les délits : Tribunal Correctionnel (involontaire) (ex : violation du secret professionnel, non-assistance à personne en danger, blessures involontaires, homicides involontaires).
  • Les crimes : Cour d’Assise (homicide volontaire)

 

Principe de la responsabilité personnelle

La responsabilité pénale est une responsabilité personnelle. C’est celui qui a commis personnellement l’infraction qui sera personnellement sanctionnés. Aucune assurance ne couvre ce risque. Lorsque l’on parle de responsabilité pénale, personnelle et punitive cela à une conséquence : nul n’assumera à la place du soignant les conséquences de ses actes. De même manière s’il est condamné au versement d’une amende (violer le secret professionnel, 15 000 euros d’amende) personne ne peut payer à sa place. Aucune assurance ne payera à sa place.

 

La responsabilité disciplinaire

La responsabilité disciplinaire est la seule qui ne soit pas engagée par un juge. Elle appartient à l’employeur. Un employeur public ou privé dispose du pouvoir disciplinaire pour sanctionner les actes des salariés jugés fautifs.

En cas d’indemnisation d’un patient consécutivement à une faute commise par un soignant son employeur peut décider de le sanctionner disciplinairement à défaut de lui faire assumer la charge des dommages et intérêts. L’employeur dispose d’une palette de sanction possible mise à sa disposition : du simple avertissement jusqu’au licenciement en passant par le blâme ou la mise à pied.

Pour la responsabilité déontologique ça ne concerne que les professionnels qui ont un ordre professionnels, exemple les médecins, les infirmières, les pharmaciens etc.…

 

Le cumul des responsabilités

Même s’il existe différentes responsabilités juridiques qui peuvent être engagé en cas de faute dont un patient peut engager une action en responsabilité pénale et une action en responsabilité civile, il peut le faire en même temps devant le Juge Pénal lorsqu’il se constitue partie civile. Il n’est pas rare qu’en cas de faute commise par un soignant que les différentes responsabilités encourues soient engagées. En cas de faute civile il peut y avoir la responsabilité disciplinaire engagée à la suite. Il peut y avoir une action en pénal et une action en civile simultanément dans le cadre de la constitution de la partie civile. Chaque responsabilité suit des chemins distincts, et donc peuvent être engagés en même temps.

Quand il n’y a pas faute mais qu’il y a un préjudice c’est l’aléa thérapeutique.

 

 Les apports de la loi du 4 mars 2002 en matière de responsabilité des professionnels de santé

Avant cette date, l’indemnisation des victimes obéissait à des règles différentes entre le privé et le public. De plus, les professionnels avaient le sentiment de voir leur responsabilité augmentait pour que les juges puissent justifier d’une indemnisation. Les enjeux de la loi du 4 mars 2002 étaient donc d’uniformiser les règles d’indemnisations entre privé et public et d’apporter une sérénité au professionnel de santé en définissant précisément les conditions de mise en cause de leurs responsabilités. Un des points essentiel est de mettre un place un régime d’indemnisation de l’aléa thérapeutique, qui soit à la fois juste pour les professionnels et les patients.

Afin de désengorgé les tribunaux, il y a eu une mise en place des procédures d’indemnisation des litiges.

La responsabilité médicale et hospitalière fondée sur la faute

La loi affirme le principe général d’une responsabilité médicale et hospitalière fondée sur la faute prouvée. Référence à l’article L.11.42-1 du code de santé public. Cet article permet de comprendre que la responsabilité du soignant n’est engagée qu’en cas de faute commise par lui. Une seule exception : celle du défaut de produit de santé, situation dans laquelle aucune faute ne sera recherché avant d’engager la responsabilité du professionnel. 2 catégories de fautes :

Faute de soin : à l’occasion de l’exercice de leur activité professionnel.

  • Sur une personne : ex (administration du mauvais produit, mauvais calcul de dose, erreur de diagnostic…)

Faute dans l’organisation et le fonctionnement du service :

  • Sur l’environnement
  • Sur les conditions pour lesquelles s’exercent les soins

Exemple : manque de personnel, insuffisance de compétence…

 

Les exceptions : la responsabilité pour faute est tempérée dans deux cas de figure.

La responsabilité de plein droit est instituée dans le cas d’un défaut de produit de santé. Exemple : un patient se trouvant sur une table d’examen et se renverse dû à un défaut de fabrication. Le patient va porter plainte contre l’établissement, mais l’établissement va se retourner contre le fabricant.

La loi précise que les établissements sont responsables des dommages résultant d’infections nosocomiales.  Sauf s’il rapporte la preuve d’une cause étrangère. L’établissement peut échapper à sa responsabilité en invoquant la preuve d’une cause étrangère soit par le fait d’un tiers, une faute de la victime ou une force majeure.

Les modalités d’indemnisation

L’intervention de la solidarité nationale. L’une des avancées de la loi est de régler le sort des dommages qui ne peuvent être attachée à aucunes fautes (défaut d’un produit de santé ou infections nosocomiales sans causes étrangères). Le droit prévoit désormais que la réparation des préjudices d’un patient consécutif à un accident médical, une affection iatrogène ou nosocomiale (lorsque l’établissement a apporté la preuve d’une cause étrangère) relève de la solidarité nationale.

L’article L.11.42-1 précise qu’un accident médical, une infection iatrogène ou nosocomiale ouvre le droit à la réparation. « … » Ouvre droit à réparation des préjudices aux titres de la solidarité nationale, un taux d’incapacité permanente, supérieur à un pourcentage d’un barème spécifique. Ce pourcentage a été fixé à 24% (fixé par décret du 4 avril 2003).

Cette solidarité nationale (le recours aux financements publiques) permet de concilier les intérêts des patients qui seront indemnisés en cas d’accident médical ou d’infection nosocomiale (incapacité à plus de 24%) et les intérêts de professionnels (leurs responsabilités n’est plus engagée contre un accident où ils n’y pouvaient rien).

  • C’est l’Office National d’Indemnisation des Accidents Médicaux (ONIAM)

Ouvre le droit à réparation des préjudices au titre de la solidarité nationale, un taux d’incapacité permanente supérieur ou égale à 24% depuis 2003.

Au niveau des délais de prescription la loi du 4 mars 2002 uniformise le délai de prescription d’actions de mise en causes des responsabilités des professionnelles. Que ce soit établissement privé ou public il y un délai de 10 ans à partir de la consolidation du dommage (la gravité a cessé d’évoluer).

La procédure extrajudiciaire du règlement des litiges

La loi du 4 mars 2002 à créer une procédure extrajudiciaire du règlement des litiges par l’intermédiaire des CRCI (commission régionale de conciliation et d’indemnisation). Il s’agit d’une procédure dite amiable, poursuit un double objectif :

  • Désengorger les tribunaux
  • Accélérer les indemnisations des accidents médicaux

La phase d’information préalable

Il existe une obligation d’informer toute personne victime ou qui s’estime être victime d’un dommage en relation soit avec de la prévention, du diagnostic ou du soin.

L’intervention de la CRCI

En cas de saisine de la CRCI, celle-ci émet un avis dans un délai de 6 mois sur les circonstances, les causes, la nature, et l’entendu des dommages, à condition qu’il représente le caractère de gravité prévu (plus de 24%). Elle se prononce également sur le régime d’indemnisation applicable et pour se faire elle pourra ordonner l’expertise. Cet avis permettra au patient si son dommage est consécutif à une faute et ce sera l’assureur du professionnel (hôpital) qui l’indemnisera. Ou si ce dommage relève de la solidarité nationale ce sera l’ONIAM qui prendra en charge l’indemnisation. Si le seuil de gravité est inférieur à 24%, le patient sera obligé de saisir les tribunaux.

Il y a aussi possibilité pour le patient de saisir le juge et la commission à condition que les deux parties soient informées.

Tableau récapitulatif

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